Les relations entre la Turquie et l’Ouzbékistan n’ont pas toujours été évidentes. Situé en Asie centrale, l’Ouzbékistan, ex-pays soviétique et pays turcophone, a accueilli avec une certaine méfiance l’influence économique et culturelle de la Turquie dans la région au début des années 1990. En effet, l’accession à l’indépendance des nouvelles Républiques
d’Asie centrale suite à la chute de l’Union soviétique a ouvert des opportunités politiques, culturelles mais surtout économiques pour la Turquie. Ainsi, certains groupes de travail et cellules politiques tels que les think tanks, véritables laboratoires de recherche et d’analyse, se sont spécialisés dans les stratégies eurasiatiques afin de favoriser la compréhension des deux pays pour faciliter les échanges. Ce rapprochement a permis de créer une prise de conscience d’un « monde turc », c’est-à-dire l’existence de liens culturels, religieux et linguistiques qui lient implicitement les pays d’Asie centrale, à savoir l’Ouzbékistan, le Kazakhstan, le Kirghizstan, le Turkménistan et le Tadjikistan, à la Turquie.
Historiquement, l’Ouzbékistan a toujours été au cœur de la région centre asiatique: d’abord avec la ville historique de Boukhara qui fut le point névralgique de la Route de soie et qui est désormais classée Patrimoine mondial de l’UNESCO avec ses 140 monuments, mais aussi lors de l’ère soviétique lorsque le pays fut un acteur important dans la mise en place de la stratégie d’intégration des peuples turcophones d’Asie centrale. Avec 27 millions d’habitants, l’Ouzbékistan est de nos jours une terre promise pour tout investisseur. Il est en effet l’un des premiers producteur au monde de coton et son territoire est parsemé de richesses énergétiques principalement de gaz naturel, d’uranium, d’or et de pétrole.
Il fut évident que dès l’indépendance du pays, en août 1991, certaine puissance naissante, et en premier lieu la Turquie, comprirent l’enjeu des opportunités qu’offrait l’ouverture d’un nouveau marché dans la région. Désormais, les secteurs du textile et du bâtiment sont devenus les points phare de l’investissement turc en Ouzbékistan, en témoigne la construction des gratte-ciel disséminés dans Tachkent, la capitale ouzbèque, qui ont été financés et bâtis pour la plupart par les hommes d’affaires turcs. Ainsi, selon les statistiques évoquées lors de la conférence par Mehmet Seyfettin Erol, Coordinateur d’ASAM, le pays compterait plus d’une centaine d’entreprises turques implantées en l’espace d’une dizaine d’années et, par ailleurs, 60% du secteur industriel serait entre les mains des turcs. « Pour intégrer la géopolitique et l’économie de cette région, l’Ouzbékistan est la première et bonne adresse », a-t-il déclaré.
Face à ce manque, certains politiciens appellent à l’établissement d’une stratégie turque concrète et objective pour l’Eurasie, tel Musa Serdar Çelebi, Président de ASAM, qui a appelé de ses vœux une nouvelle réflexion pour comprendre ce que l’Ouzbékistan attend de la Turquie. Il a également encouragé des échanges universitaires plus conséquents, faisant allusion au dernier rappel dans leur pays d’origine des étudiants ouzbeks de Turquie, qui avait alors envenimé les relations diplomatiques entre les deux pays.
L’Ouzbékistan a donc lancé un message clair à la Turquie; prônant le dialogue des cultures, le pays se dit disposé à recevoir davantage les investissements turcs. Il reste à souhaiter que cette conférence, ayant ouvert le débat, trouve écho prochainement chez les entrepreneurs turcs et les politiciens ouzbeks.
Sabrine Balım / www.aujourdhuilaturquie.com
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